3. La gestion digitale des projets
Une fois que le jumeau numérique du bâtiment est mis en place, la question suivante porte sur l’ordre des étapes de la construction de l’immeuble physique. Aujourd’hui, ce sont les planificateurs de projet qui déterminent leur enchaînement. Celui-ci se fonde sur l’expérience, est généralement imprécis, et est difficile à ajuster si des retards surviennent lors d’une étape intermédiaire.
La digitalisation laisse augurer des améliorations spectaculaires pour la gestion de projet. Par exemple, la société américaine Alice Technologies travaille à l’automatisation complète de ce processus. L’ordinateur apprend l’enchaînement idéal des étapes du projet et s’appuie sur les données BIM pour élaborer seul les plans de celui-ci. Ils peuvent être actualisés instantanément en cas de retard quelque part. Cela garantit le choix du meilleur enchaînement possible. Selon l’entreprise, cette solution peut déjà permettre d’économiser en moyenne 11 % des coûts et 17 % du temps lors de la construction.
À l’avenir, la gestion de projet assistée par ordinateur devrait s’affiner encore davantage. Cela pourrait à son tour modifier les modes d’attribution des marchés pour les projets de construction : ainsi, même les petites étapes d’un projet, comme l’installation d’appareils d’ambiance tels que des thermostats, pourraient faire l’objet d’un appel d’offres via une application, sous forme de lots de travaux à un prix prédéfini - de la même façon qu’Uber propose des trajets à ses chauffeurs. Cela donnerait aussi la possibilité à de petits installateurs locaux de participer à des projets de construction. De plus, une application de ce type pourrait permettre d’effectuer le contrôle de la qualité par le biais de commentaires et d’avis.
4. Construire tout en préservant les ressources
La construction de bâtiments exige des ressources considérables et n’est en rien respectueuse du climat : chaque année, environ 4,4 milliards de tonnes de ciment sont produites, libérant à peu près autant de CO2 que 700 centrales à charbon.
Afin de réduire l’empreinte environnementale des bâtiments et des infrastructures, il est primordial d’utiliser les matériaux de construction de manière durable. Premièrement, il faut recycler un plus grand nombre de matériaux de construction. Dans une certaine mesure, c’est déjà ce que l’on est en train de faire aujourd’hui. Par exemple, un voile béton existant n’est plus démoli et reconstruit, mais incorporé dans la conception du nouveau bâtiment, ou réutilisé comme matériau de remplissage. Deuxièmement, il conviendrait d’utiliser plus largement des matériaux de construction alternatifs plus respectueux du climat, comme le bois.
Les nouvelles technologies peuvent également rendre la construction plus économe en ressources. Par exemple, l’impression 3D promet non seulement des processus plus efficaces, mais aussi une réduction massive de l’empreinte environnementale, la fabrication additive pouvant servir à imprimer de nouvelles formes qui utilisent moins de matériaux de construction sans pour autant compromettre la stabilité.
5. Des robots sur le chantier
Une autre tendance déjà visible aujourd’hui est le recours à des robots : les robots de forage de Schindler ou d’Hilti, par exemple, sont déjà utilisés pour percer des trous dans le béton de manière autonome, en fonction des données spécifiées. Des robots sont aussi déjà utilisés pour fabriquer des structures complexes à partir de matériaux de construction alternatifs.
La pression accrue exercée sur les coûts entraînera une plus grande industrialisation de la construction. Grâce aux nouvelles méthodes de fabrication digitale, les composants seront produits individuellement et à la demande. Dans la mesure où davantage d’éléments seront intégrés dans des produits préfabriqués (composants électriques, etc.), le chantier du futur mettra de plus en plus l’accent sur l’assemblage des éléments préfabriqués.
6. L’exploitation du bâtiment basée sur des données
Le chauffage, la climatisation et la production d’eau chaude sanitaire sont les activités qui nécessitent le plus d’énergie pendant la phase d’exploitation d’un bâtiment. Le bâtiment intelligent du futur sera équipé de capteurs et de commandes intelligentes afin de rendre l’exploitation de ses équipements aussi efficace que possible. Il prendra également en compte les habitudes et les besoins des occupants de l’immeuble : il est inutile, par exemple, de chauffer les espaces inoccupés. Le bâtiment intelligent intègre dans son comportement les prévisions météorologiques et la disponibilité d’énergie renouvelable (produite, par exemple, par le système photovoltaïque installé sur le toit).
Les données recueillies dans le bâtiment intelligent peuvent être analysées par des algorithmes en vue d’optimiser la gestion de l’immeuble : lorsque des écarts apparaissent, le gestionnaire des installations est informé, de façon à pouvoir décider des mesures à prendre. Les données seront disponibles sous une forme standardisée, et des applications permettront de les traiter et d’offrir une valeur ajoutée, comme des économies d’énergie. Ces applications pourront être mises à disposition sur un marché virtuel, et les clients pourront choisir celles qui répondent le mieux à leurs besoins.
Quelles perspectives pour demain ?
Bien que les technologies et les matériaux requis pour rendre le secteur de la construction et de l’immobilier plus durable et plus intelligent existent déjà, la voie de l’avenir de la construction est semée d’embûches. Aujourd’hui, de nombreuses entreprises ne se sentent pas incitées à s’engager activement dans le changement. Des exigences réglementaires et des structures constituées au fil du temps font en partie entrave au progrès. Et tant que la pression exercée sur les coûts n’est pas suffisamment forte, l’automatisation du secteur de la construction n’avancera pas. Toutefois, à long terme, cette approche ne sera pas viable. Le progrès et la digitalisation l’emporteront, comme l’ont clairement montré les exemples des secteurs de l’imprimerie, de la photographie et de la musique.
La bonne nouvelle, c’est qu’il existe de nombreux moyens de moderniser le secteur de la construction. Les développeurs de logiciels, les start-ups et les technologies avancées peuvent – et vont – révolutionner beaucoup de choses. Ce n’est que le début…